La
musique de cette formation de l’est de la France est le résultat
d’un mélange étrange. Enragé, insidieux et chaotique,
l’univers de RAUWOLFIA s’est affirmé en deux albums. Encore
contraints par certaines limites techniques (liées à l’autoproduction)
à ravaler la puissance dévastatrice que l’on sent sourdre
dans les compositions, le groupe mérite que l’on s’attarde
sur ses productions. « Dark elektro for young cyberpunks ».

 

Pouvez-vous
nous raconter l’histoire de RAUWOLFIA VOMITORIA, les débuts… ?

Eric :
La véritable origine du groupe remonte à 1990 lorsque Olivier
COLIN, un ami d’enfance, est venu me voir en me disant qu’il fallait
que l’on monte un groupe. Nous nous sommes mis au travail, utilisant
le peu de matériel que nous avions à l’époque et
les idées qui nous passaient par la tête. C’est comme cela
qu’est née la première mouture du groupe, à deux,
dans nos chambres et nos garages, sans vraiment avoir nommé notre formation.
Il y eut alors un moment de flottement. Après quelques temps passés
sans vraiment avancer, Olivier me fit part de la demande d’une copine.
C’était Géraldine FRANOUX, qui jouait un peu de batterie
et qui poussait la chansonnette dans son coin. Olivier lui avait parlé
de notre projet et elle s’y intéressa. Mais cela restait toujours
du bidouillage. On s’est un peu perdu de vue pendant quelques années
puis, à l’été 1994 le groupe prit une autre allure.
Géraldine avait alors un ami, José FERREIRA, qui se greffa à
notre bande de musiciens. La formation nouvelle fut la suivante : Géraldine,
chant et claviers, José, chant, Olivier, percussion et Eric, guitare,
claviers et autres machines. Et la composition démarra vraiment. Olivier
préféra quitter le groupe car il était occupé
de son côté par beaucoup d’autres activités. José
trouva notre nom : RAUWOLFIA VOMITORIA. Le groupe qui traversa des périodes
multiples, dont l’une des plus marquantes fut le passage rapide mais
efficace de Stéphane POISSONNIER à la basse. Il nous laissa
quelques morceaux de son crû en guise de cadeaux. Lui aussi finit par
nous quitter car il avait des obligations qui l’appelaient ailleurs.
Géraldine partit en 1997 ; elle vit maintenant en Angleterre.
Elle fut remplacée par Carole JEANSSON, en 1998. La dernière
mutation est la restructuration de 1999. José est remercié et
remplacé par Giovanni au chant, Carole en deuxième voix et je
poursuis mes activités au sein du groupe rebaptisé à
l’occasion RAUWOLFIA, pour faire plus simple et marquer ainsi une transformation
majeure dans notre petite histoire. Giovanni devrait apporter du sang neuf,
chose dont le groupe avait bien besoin depuis quelque temps.

Que
signifie ou que représente RAUWOLFIA VOMITORIA pour vous ?

Eric :
Le Rauwolfia Vomitoria est une plante médicinale utilisée dans
la pharmacopée traditionnelle d’Inde ou d’Afrique, je ne
sais plus justement. Elle sert comme fébrifuge. Le spécialiste
de la botanique, c’est José. C’était une idée
à lui. De toute façon, le nom du groupe a raccourci pour devenir
RAUWOLFIA. Les Rauwolfia existent dans la nature en plusieurs espèces,
dont la Vomitoria. Nous ne gardons maintenant plus ce nom que pour ne pas
rompre complètement avec notre court passé et ne pas perdre
nos acquis.

Considérez-vous
l’autoproduction comme une fin en soi pour exprimer votre art, ou envisagez-vous
la recherche d’un label ?

Carole :
Nous sommes passés par le stade de l’autoproduction mais nous
désirons maintenant voir plus loin. Un label serait intéressant.

Eric :
L’autoproduction présente l’immense avantage de laisser
toutes les libertés aux musiciens qui choisissent ce mode de diffusion
pour leur travail. Elle permet également aux artistes un tant soi peu
équipés et organisés, de produire leur musique sans avoir
à se reposer sur d’autres personnes qu’eux-mêmes.
Ils ne sont pas astreints à subir les refus de maisons de production
qui ne verraient pas le potentiel d’un jeune groupe ou qui ne souhaiteraient
pas prendre de risques financiers. Cependant l’autoproduction ne permet
pas de toucher un large public car elle est limitée en quantité
d’exemplaires fabriqués et la production étant entièrement
portée à bout de bras par le groupe, on n’est même
pas sûr de pouvoir écouler le stock de disques ainsi produit.
Notre groupe a choisi ce biais pour produire « Kill me or die »
parce qu’il nous était devenu matériellement possible
de fabriquer nos propres disques, pour nous faire connaître, obtenir
une crédibilité auprès du public. Maintenant, nous passons
à une autre phase et la recherche d’un label pouvant relayer
nos efforts, fait partie de notre travail actuel.

Giovanni :
L’autoproduction permet de s’autoproduire nous-mêmes sans
les autres (excepté nous bien sûr).

Quelles
ont été vos influences (personnelles, pour le groupe…) ?

Carole :
DEAD CAN DANCE et ce genre de choses.

Eric :
sur le plan personnel, mes influences vont du cinéma fantastique et
de science fiction à la consommation sans limite de vulgarisation scientifique.
J’écoute beaucoup de musique électronique, au sens large,
du goth, de l’indus, du métal, (pas tout) et beaucoup d’autres
choses, allant du rock au classique. Peu importe l’étiquette,
si une musique me plaît, je lui prêterai l’oreille. Je lis
des romans, des essais. Je musarde chez les amis, il n’y a que chez
eux que je lis des BD par exemple. Je ne peux pas vraiment parler au nom des
membres du groupe qui sont partis mais si vous voulez comprendre comment est
né le premier cd, il faut les évoquer, car ils ont fait partie
des géniteurs de « Kill me or die », notre premier
disque auto-produit. Géraldine aime beaucoup EINSTURZENDE NEUBAUTEN,
COCTEAU TWINS (R.I.P.), DEAD CAN DANCE (R.I.P.), DAS ICH, SIEWOLF, SONIC YOUTH.
José est plus intéressé par la botanique, il consomme
beaucoup de musique électronique lui aussi.

Giovanni :
KISS.

Actuellement,
comment vous situez-vous dans le « paysage musical »,
métal-indus (SPINA, COLLAPSE, Y FRONT, SIN…), dark-électro
(DAS ICH, :WUMPSCUT:)?
En étant bien
entendu conscient des limites de cette classification pratique mais profondément
absurde.

Eric :
Après avoir réfléchi assez longtemps, et comme il faut
bien se coller un style pour que les gens nous situent à peu près,
nous nous sommes arrêtés sur dark élektro. Nous faisons
une musique basée sur divers instruments électroniques mais
le chant et la guitare (qui pourra être Gothique ou métal, selon
l’ambiance du morceau) sont tout aussi prépondérants.
Le chant masculin est trafiqué, déstructuré. Carole chante
presque au naturel (excepté une petite réverb ou un delay par-ci
par-là) ce qui apporte une touche de douceur à l’ensemble.
Mais les puristes pourront aussi bien parler de nous en évoquant la
darkwave, l’indus, l’EBM, un peu de métal, le goth. Avoir
choisi dark élektro, c’était une façon pour nous
de résumer tout cela.

Giovanni :
Proche du dernier album de BOY GEORGE. J’ai un scoop : Marc Almond
jouait en fait dans SIGUE SIGUE SPOUTNIK et je lui servais d’esclave
sexuel ( je n’avais alors que sept ans).

Comment
envisagez-vous le rapport machines/instruments, entre guitares déchirantes
« à la COCTEAU TWINS » et les samples, l’électronique ?

Eric :
L’utilisation de machines ou d’instruments « plus traditionnels »
n’est en aucun cas un problème. J’ai appris à jouer
de la guitare quand j’étais petit dans un milieu plutôt
rock’n roll/blues/Chanson à texte mais cela n’empêche
pas d’être fan de tout ce qui est technologique. La musique ne
devrait pas engendrer de tels débats de toutes façons stériles.
Peu importe si une musique est générée de façon
programmée, traitée par des effets, jouée sur partition
avec des instruments, improvisée… Tant qu’elle sonne bien,
c’est le principal !

Giovanni :
Cette question ne devra m’être posée que lorsque je saurai
de quoi il s’agit.

Votre
musique exprime souvent la douleur, l‘angoisse, la violence ; lors
des concerts, il y a-t-il une mise en scène en rapport avec ces thèmes ?

Eric :
La scène a toujours été pour nous une difficulté.
C’est pour cela que nous accueillons Giovanni avec espérance.
Il a en effet pu accumuler une expérience de la scène avec les
groupes dans lesquels il a joué, jusqu’au dernier en date (dans
lequel il chante toujours d’ailleurs), HALBA’S DOGS. Nous n’avons
pas vraiment pu exprimer sur scène ce que nous voulions jusqu’à
présent. Des amis (Eric « Mie » GRANDEMANGE et
Yvan BASTIEN) ont réalisé une vidéo que nous projetions
quand nous le pouvions pendant notre set. Mais il n’était pas
toujours possible de l’utiliser tout simplement parce que cela imposait
d’employer un matériel que les organisateurs n’avaient
pas nécessairement. Cette vidéo est pourtant très illustrative
de nos thèmes musicaux. Mais nous avons des projets nouveaux, comme
un décor de scène et la réalisation d’une vidéo
plus récente pour projeter dans nos futurs prestations. Cette vidéo
ne remplacerait pas l’ancienne mais pourrait être utilisée
en alternance avec elle. Si les organisateurs potentiels nous laissent tout
installer, on s’approchera déjà nettement plus de ce que
nous désirons montrer au public.

Giovanni :
Je vois des Bretonnes qui dansent avec nous sur scène, des punks se
suicideraient pendant la performance, Alex, mon petit ami, s’immolerait
par le feu pendant que Gilles (mon jeune cousin touché par la progéria)
s’accouplerait avec des chimpanzés bonobo.

Vous
utilisez plusieurs idiomes (anglais, portugais…), est-ce qu’ils
ont un rôle particulier (le portugais semble voué aux moments
calmes et mélancoliques) ?

Carole :
Je vais peut-être me lancer dans des textes en espagnol mais cela reste
encore du domaine de l’hypothétique !

Eric :
L’usage de plusieurs langues dans nos textes était prémédité.
Nous avons dès le départ décidé de ne pas limiter
l’expression du groupe en n’utilisant qu’une langue. On
s’efforce d’être le plus universel possible. Il y a donc
de l’anglais, du portugais, du français (Kadath, morceau
qui ne figure pas sur  « KILL ME OR DIE », mais
que nous jouons sur scène, est rédigé dans cette langue),
et quelques bribes d’allemand. Si nos connaissances nous le permettaient,
nous ferions des textes dans toutes les langues ! L’utilisation
du portugais vient de José, qui est né au Portugal. En revanche
l’emploi d’une langue ou d’une autre dans un morceau en
fonction de l’atmosphère qu’il est sensé dégagé
reste fortuit. Enfin je crois. Maintenant que Giovanni a remplacé José,
il se pourrait bien que RAUWOLFIA fasse des textes en italien en lieu et place
du portugais. Giovanni, comme son nom l’indique, a de la famille en
Italie. Et Carole a déjà écrit de nouveaux textes en
français.

Giovanni :
Il est vrai que, de par mes origines siciliennes, l’idée m’est
venue de faire intervenir ma grand-mère au sein du groupe récitant
des poèmes en latin.

Quels
sont vos projets ?

Carole :
Travailler pour s’améliorer.

Eric :
Nous allons nous efforcer de sortir un dix ou douze titres cette année,
mais nous ne savons pas encore précisément quand. Il sera peut-être
produit par un label, si quelqu’un veut bien de nous (avis aux personnes
intéressées, nous cherchons une maison de production). Et si
personne n’entend notre appel, nous le produirons de la même façon
que « KILL ME OR DIE », avec nos propres moyens et nos
petites mains. Nous sommes toujours à la recherche de plans concerts
et nous avons quelques pistes en vue. Faire toujours plus de musique.

Giovanni :
Mes intentions sont d’apprendre la sténodactylographie pour pouvoir
écrire mes réponses moi-même à l’avenir.


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